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La souveraineté des États face à la question écologique : le cas du Brésil et de son Amazonie

Dernière mise à jour : 12 mai 2021

La question écologique, évoquée dans les relations internationales, désignerait l’expression des vives préoccupations pour les générations actuelles et futures quant à la multiplication des aléas naturels et crises écologiques[1]. Le réchauffement climatique, la perte de biodiversité, la pollution et l’épuisement de ressources en sont les manifestations les plus préoccupantes.

Associée à la notion d’espace, elle est un enjeu des relations internationales, et censée avoir une dimension globale. La question écologique est ainsi vue comme transfrontalière, intéressant donc la géopolitique. Klaus Toepfer, directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), affirme même que la détérioration de l'environnement peut devenir un facteur de multiplication des guerres[2]. La question écologique rencontre ainsi la problématique de la souveraineté des États.

Au plan théorique, la souveraineté étatique serait pour un État la capacité de gérer pleinement ses enjeux internes sans risque d’ingérence étrangère. Par ailleurs, les tensions diplomatiques nées de la question écologique évoquent quelque chose: la souveraineté ne semble exister que dans la relativité. Le cas de l’Amazonie l’illustre bien, et il convient ici de l’étudier. L’importance écologique de cette partie du monde soumet le Brésil, ainsi que les autres États qui se la partagent, à cette problématique de souveraineté. Pourquoi le cas du Brésil est-t-il alors représentatif des débats sur l’Amazonie ?


Un premier élément de réponse est que 60% de la superficie totale du bassin amazonien se trouve en territoire brésilien[3]. De plus, l’ensemble de l’Amazonie possède « plus de la moitié de toutes les espèces animales et végétales connues de la planète »[4]. Selon Oliver Dabène et Frédéric Louault, « l’Amazonie est au cœur des contradictions du Brésil, fantastique réserve de ressource et levier de développement, elle abrite la plus riche biodiversité et concentre la plus grande réserve oxygène de la planète »[5].

Par ailleurs, la politique du Brésil à l’égard de l’Amazonie préoccupe de plus en plus la communauté internationale, car jugée trop peu écologiste. À ce motif, elle n’accepterait pas que l’État brésilien, malgré sa souveraineté sur l’espace en question, décide comme bon lui semble du « poumon de la planète ». Au nom de la protection de la planète contre les risques écologiques, bien des pays comme la France et les États-Unis se positionnent face à la gestion faite de l’Amazonie, une gestion critique aux yeux de la communauté internationale. Pour preuve, la déforestation en Amazonie brésilienne a atteint son plus haut niveau ces dernières années. La politique du Président Jair Bolsonaro sur l’Amazonie inquiète. On peut ainsi évoquer son ambition, affichée lorsqu’il était en campagne, de légaliser l’agriculture ou les activités minières dans des zones protégées, et de réduire les fonds alloués aux programmes de protection de l’environnement.

Les interactions médiatiques sur la gestion amazonienne, notamment sous l’administration Bolsonaro, rendent compte de l’énorme place qu’occupe le Brésil dans les débats sur l’Amazonie. D’ailleurs, les qualificatifs en disent long sur l’enjeu que représente cette dernière : « Poumon de la planète » ou encore « patrimoine écologique de l’humanité ». Ils traduisent des relations d’interdépendances et d’intérêts entre les États qui, dans ce cas précis, est à l’origine d’une nécessaire coopération au regard des enjeux[6].


La convoitise du potentiel économique de l’Amazonie, objet de préoccupations environnementales


L’économie brésilienne dépend fortement de ses exportations, et mise sur le potentiel agricole de l’Amazonie. L’accès aux matières premières dans l’Amazonie brésilienne a, de toute façon, toujours suscité l’intérêt des grands acteurs économiques. L’exemple de la Chine et du marché qu’elle représente pour le soja brésilien est très représentatif de cette dynamique. Sous l’administration Bolsonaro, et dans un contexte de renforcement des partenariats économiques, le Brésil a augmenté ses exportations de soja vers la Chine[7]. Or, l’exploitation du soja, telle qu’elle est constatée, se révèle être responsable de la destruction forestière. Par ailleurs, le Brésil est, depuis des années, devenu l’un des principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre